Alors qu’ils leurs avaient refusé une première fois en 1959, les Suisses accordent à leurs concitoyennes le droit de vote au niveau fédéral le 7 février 1971.
C’est un événement atypique dans cette Europe libérale qui voyait voter la majorité de ses femmes depuis la fin du XIXe siècle et sa totalité depuis les années cinquante. C’est dire l’incompréhension à l’époque et encore aujourd’hui. Pourtant, plusieurs pistes d’explication peuvent être avancées.
La Suisse possède une particularité bien connue qui est principalement la cause de ce retard : la démocratie semi-directe. En effet, le droit de vote des femmes entrainait une modification de la Constitution qui obligea les autorités de la Confédération à organiser un référendum, où une double majorité est requise. Une majorité populaire et une autre cantonale.
Ce mécanisme conditionnait le droit de vote des femmes directement à l’évolution des mentalités de ces messieurs, jouissant eux du droit de vote universel depuis 1848 (les premiers avec les Français).
Ainsi, lorsque pour la première fois les Suisses se prononcent sur le droit de vote féminin en février 1959, ils le refusent à 67%. Douze ans plus tard, ce sont 66% d’entre eux qui affirment leur choix de donner le droit de vote à leurs femmes.
Mais peut-on sérieusement affirmer que dans les autres pays européens le résultat de 1959 eut été différent si on avait soumis la question du vote féminin à référendum ? Deux éléments factuels nous permettent d’en douter. Tout d’abord, la situation de la femme, notamment du point de vue social, était en décalage avec le droit de vote. Les Françaises se voient certes accorder le droit de suffrage en 1944 mais elles ne peuvent travailler légalement sans l’accord de leur mari jusqu’en 1965 et la puissance paternelle régit l’éducation des enfants jusqu’en 1970. Ces innovations coïncident dans le temps avec celles adopter outre Jura.
Surtout, la Suisse est l’un des rares pays qui possède un gouvernement à majorité féminine, dirigé par une femme à 4 reprises depuis 1999. La part des femmes au Conseil National (chambre basse) s’élève à près de 30% pour une moyenne européenne de 22%.
P.C